Alors que les dirigeants européens discutent entre eux de la diminution de leurs contributions au budget communautaire, les citoyens de l'UE, eux, continuent de payer simplement pour pouvoir se parler au téléphone. Soixante-cinq ans après le traité de Rome et les grandes libertés de circulation, vingt ans après le traité de Maastricht et le marché unique, dix ans après le début de la révolution Internet, le secteur de la téléphonie mobile fait partie des derniers domaines à subir des entraves au passage des frontières intérieures.
De fait, les frais d'itinérance (« roaming ») constituent aujourd'hui un obstacle à la libre circulation des idées à travers l'Union. Cette situation ne peut plus durer et c'est pourquoi nous lançons officiellement une « initiative citoyenne européenne ».
L'initiative citoyenne est un instrument inédit de démocratie directe et participative. Grâce à elle, depuis avril 2012, sept citoyens résidant dans sept pays différents peuvent former un « comité » qui portera une proposition de législation européenne, pourvu que celle-ci soit recevable et ne porte pas atteinte aux valeurs fondamentales de l'Union. Si 1 million de personnes y apportent leur soutien dans un délai d'un an, la Commission européenne doit prendre en compte le projet, et la procédure législative classique peut alors s'enclencher.
Jeunes Européens de la « génération Erasmus », nés au milieu des années 1980, nous avons décidé d'utiliser cette outil démocratique pour améliorer le quotidien de citoyens qui, comme nous, vivent l'Europe unie comme une évidence, mais qui se voient rappeler chaque mois, avec leurs factures de téléphone, qu'il fut un temps - au siècle précédent -où nos frontières intérieures étaient encore marquées par des postes de douanes.
Selon une enquête Eurobaromètre de 2011, 72 % des personnes qui voyagent dans un autre pays européen réduisent leurs communications téléphoniques à cause du surcoût de l'itinérance. Et une proportion sans doute plus importante encore des possesseurs de téléphone mobile évitent d'appeler depuis leur pays vers un autre Etat membre de l'UE en raison du prix des communications intra-européennes. Sans compter ceux, qu'ils soient étudiants étrangers, travailleurs transfrontaliers ou expatriés, qui doivent jongler avec plusieurs téléphones et abonnements nationaux différents !
Certes, depuis plusieurs années, l'Union européenne limite plus fortement la possibilité d'appliquer des frais supplémentaires aux communications intra-européennes, tant il semble évident que ces surcoûts s'apparentent plus à une rente qu'à un véritable coût pour les opérateurs de téléphonie mobile. Ainsi, plusieurs règlements successifs sont venus fixer des plafonds toujours moins élevés aux prix du « roaming », le dernier datant de mai 2012. Mais si le but de ces législations est à terme la convergence entre les tarifs nationaux et européens, cet horizon est bien loin pour les citoyens qui peuvent se voir adresser des factures à trois chiffres...
Avec le soutien d'Henri Malosse, futur président du Comité économique et social européen, organe de l'UE qui rassemble à Bruxelles les représentants des employeurs, des syndicats et de la société civile en général, nous débutons officiellement la collecte des signatures. Si 1 million de signatures nous parviennent dans les prochains mois, nous aurons réussi notre pari : rapprocher les citoyens de l'Union européenne en montrant qu'elle les écoute et qu'elle leur est utile, pour en finir une bonne fois pour toute avec cette contrainte d'un autre âge qui nous empêche de communiquer librement.