La plupart des problèmes de connexion découleraient de bugs dans les smartphones, à la fois de plus en plus complexes et variés.
Les meilleurs smartphones ne sont pas ceux que l’on croit. Selon une étude menée fin 2012 à l’université d’Aalborg, l’iPhone 4S et même l’iPhone 4 fonctionnent mieux que l’ iPhone 5 , et le Galaxy S2 (qui était encore à l’époque le dernier cri chez Samsung) mieux que le Galaxy S3 . Voilà qui pourrait refroidir l’enthousiasme des lève-tôt qui font la queue devant les boutiques Apple ou Samsung pour s’offrir le smartphone le plus cher du moment, pensant bénéficier ainsi de l’appareil le plus rapide et le plus puissant... Le Pr Gert Frolund Pedersen et son équipe ont également montré que la qualité des antennes pouvait varier d’un facteur de un à dix suivant le modèle de téléphone.
Pour Laurent Lamé, en charge des terminaux chez SFR, ces conclusions ne sont pas vraiment une surprise. « Il est devenu très difficile de fabriquer un téléphone. Il y a dix ans, il suffisait d’une antenne 2G. Aujourd’hui, il faut plusieurs antennes et des modules 2G, 3G, 4G, Wifi, NFC, sur plusieurs bandes de fréquences », souligne-t-il. Le téléphone doit donc gérer de nombreuses et périlleuses interactions.
Une tardive chasse aux bugs
Par ailleurs, gare aux changements de design. « Il suffit d’un nouveau matériau sur la coque arrière, d’une nouvelle peinture, d’une connectique différente pour que l’expérience se dégrade », ajoute-t-il. Ainsi, le Wave de Samsung n’est pas NFC-compatible en raison de son cerclage de métal. Quant au Nokia Lumia 900, il a été critiqué par les opérateurs car ses performances radio n’étaient pas assez bonnes. Un comble pour un constructeur aussi expérimenté.
Tous les constructeurs ont des déconvenues avec certains smartphones. Apple, qui a débarqué sur le marché en 2007, a dû progresser en commençant par améliorer la durée de vie de la batterie - préoccupation numéro un des mobinautes. Encore aujourd’hui, l’iPhone 5 ne satisfait pas complètement les critères des opérateurs : il arrive trop souvent que la conversation coupe, ou que l’on appelle dans le vide. « L’iPhone arrive trop tard dans nos labos, explique un opérateur. D’habitude, nous testons les téléphones pendant 2 à 5 mois, mais avec Apple nous ne pouvons pas faire la navette pour améliorer le produit. » Résultat, la chasse aux bugs se fait après la sortie du téléphone... avec les consommateurs.
La loi du silence
L’omerta règne au sujet de ces dysfonctionnements, regrette John Strand, le fondateur du cabinet danois Strand Consult : « Ce devrait être le rôle des opérateurs d’alerter leurs clients. Mais ils sont tenus au silence par contrat. Par exemple, Apple leur interdit de parler de l’iPhone sans son aval. » De plus, les opérateurs n’ont aucun intérêt à faire de la mauvaise publicité pour la marchandise qu’ils écoulent ! Le consultant cite d’autres raisons à la multiplication des bugs : la concurrence qui s’intensifie pousse à raccourcir le temps des tests pour commercialiser plus vite ; un marché gris se crée où les opérateurs revendent dans une zone géographique des smartphones adaptés à une autre...
John Strand se désole cependant qu’on critique les opérateurs dès que « ca ne marche pas » : « En réalité, 70% des mauvaises expériences ne sont pas liées au réseau, mais au terminal. Ouvrons le débat. Il n’y a pas de raison que ce soient toujours les mêmes qui investissent dans la qualité. » Au Danemark, d’ailleurs, les tests officiels de couverture réseau seront désormais réalisés en parallèle « avec un bon téléphone » et « avec un mauvais téléphone ».