La situation des MVNO sur le marché français de la téléphonie mobile : l'avis de l'ARCEP rendu dans le cadre de la saisine de l'Autorité de la concurrence par Alternative Mobile.
Paris, le 22 janvier 2013
Saisie par Alternative Mobile, l'Autorité de la concurrence a demandé à l'ARCEP de rendre un avis concernant le fonctionnement concurrentiel des marchés de gros et de détail de la téléphonie mobile en France, notamment en examinant le niveau des prix de gros au regard des prix de détail pratiqués par les opérateurs et, plus largement, en éclairant les acteurs du marché et le régulateur sur les mesures à apporter pour permettre aux MVNO d'animer la concurrence sur le marché de détail de la téléphonie mobile.
A la suite de la publication de l'avis rendu par l'Autorité de la concurrence à la demande d'Alternative Mobile, l'ARCEP publie l'avis qu'elle avait elle-même transmis à l'Autorité de la concurrence le 20 novembre 2011. Elle se félicite à cette occasion du fait que l'avis de l'Autorité de la concurrence reprenne pour l'essentiel ses propres analyses.
L'ARCEP note que, depuis son avis transmis en 2008 (1) au Conseil de la concurrence, le marché de détail mobile grand public métropolitain, ainsi que le marché de gros de l'accès et du départ d'appel mobile ont connu de très importantes évolutions :
- l'émergence, courant 2010, des offres dite éco sans terminaux (SIM only), puis courant 2011, des offres sans engagement ;
- le lancement, courant 2011, des offres de secondes marques, dites " low - cost ", des opérateurs de réseau historiques ;
- la généralisation des offres à composantes d'abondance voix, SMS et data ainsi que le développement des offres quadruple play ;
- le lancement commercial de Free Mobile en janvier 2012 marqué par la simplicité de ces offres, leur prix et le découplage systématique des abonnements et du terminal.
L'ARCEP constate que les MVNO ont vu leur part de marché, pour le segment résidentiel, croitre entre 2009 et 2011 puis se stabiliser depuis le début de l'année 2012 autour de 13%, alors qu'elle n'était que d'environ 6% en 2009.
Les MVNO ont été diversement affectés par l'entrée du quatrième opérateur. Toutefois, contrairement aux opérateurs de réseaux, le nombre de clients post-payés des MVNO demeure inférieur au nombre de clients prépayés. Enfin, il convient de noter que les MVNO ne sont que très marginalement présents sur le segment entreprise du marché mobile.
Les engagements d'accueil des MVNO, les premiers contrats full-MVNO
Sur la même période, l'Autorité constate également que le marché de gros a lui aussi connu des évolutions significatives.
En effet, pour faire suite à l'avis du Conseil de la concurrence de 2008 qui avait notamment souligné la nécessité de déverrouiller les contraintes contractuelles pesant sur les MVNO, l'ARCEP a prévu, dans les appels à candidatures pour l'attribution des fréquences 3G résiduelles et 4G, un critère d'engagement portant sur les conditions d'accueil des opérateurs virtuels auxquels les opérateurs ont souscrit. Ainsi, les opérateurs de réseau ont l'obligation de faire droit aux demandes raisonnables d'accès dans des conditions contractuelles, techniques et tarifaires, spécifiques, précisées par les autorisations d'utilisation de fréquences correspondantes.
Par ailleurs, courant 2011, les premiers contrats full-MVNO ont été signés entre opérateur de réseau et opérateur virtuel. Ils constituent une évolution favorable vers une plus grande autonomie commerciale des MVNO.
La situation des MVNO dans ce nouveau paysage du marché
Il apparaît néanmoins que certaines caractéristiques du marché de gros, définies par les opérateurs hôtes, ont connu des évolutions moins significatives, notamment sur certains aspects tarifaires et techniques.
Ainsi, au regard des points spécifiques soulevés par Alternative Mobile, ceci a pour conséquence, pour les MVNO, de ne disposer que d'un espace économique faible, voire inexistant, sur une partie des offres de leur opérateur hôte, que ce soit au niveau tarifaire ou au niveau des services.
Cet avis est partagé par l'Autorité de la concurrence qui constate que les MVNO ont contribué à animer le marché et à diversifier l'offre grâce à leur capacité à innover et à explorer de nouveaux segments de clientèle, mais que, compte tenu des bouleversements qu'a connus le marché mobile, les MVNO éprouvent des difficultés pour être présents sur l'ensemble des segments du marché, en particulier les offres " low-cost ".
Les préconisations de l'Autorité de la concurrence et les suites à donner par l'ARCEP
Les principales conclusions de l'avis de l'Autorité de la concurrence sont :
- qu'aucune barrière technique ou tarifaire (encadrement des volumes, possibles effets fidélisants liés à la structure tarifaire des contrats de gros, limitation des débits, accès aux femto-cellules ou aux services de géolocalisation) ne doit être artificiellement érigée par les opérateurs de réseau, au risque de désavantager les opérateurs mobiles virtuels dans la dynamique de la concurrence ;
- que les engagements liés à l'attribution des fréquences 4G, qui ont été volontairement souscrits par les quatre opérateurs de réseau (accueil de full MVNO, tarifs raisonnables), doivent, en toute rigueur, s'appliquer avant même le lancement des premières offres commerciales 4G par ces opérateurs de manière à ce que les MVNO puissent proposer des offres similaires simultanément à celles commercialisées par leurs opérateurs hôtes.
Ces préconisations reposant sur le respect des engagements pris par les opérateurs, soit dans le cadre de l'attribution de la 4ème licence 3G, des fréquences résiduelles 3G ou des fréquences 4G, l'ARCEP rappelle qu'elle suit de manière attentive la mise en œuvre de ces engagements et précise qu'elle portera une attention particulière aux conclusions de l'Autorité de la concurrence. A ce titre, elle peut être amenée à sanctionner un éventuel manquement ou être saisie d'un différend entre MVNO et opérateur hôte.